Les leçons des sciences de la complexité ont été appliquées au secteur financier. Cela a conduit à la conclusion unanime que le secteur financier présentait des risques systémiques susceptibles de mener soudainement à un krach.

Malgré tout ce qui a été écrit et dit, peu a été fait. Certes, il y a eu l’augmentation des réserves des banques, plus de règles et de surveillance des risques, mais aucune adaptation du système lui-même. Contrôler des risques individuels à l’aide de feuilles de calcul, cela paraissait aussi simple que cela.

Puis est arrivé le choc aux États-Unis, où la Silicon Valley Bank a démontré que la technologie peut tout accélérer, même une panique bancaire. Ensuite il y a eu la Suisse, où un problème de longue date d'une banque surdimensionnée a abouti à une prise de contrôle forcée.

Que ces problèmes systémiques n’aient pas été visibles ces dernières années, cela vient du fait qu’ils étaient dissimulés par un voile de liquidités. Les dernières semaines ont montré de manière évidente que les risques systémiques que nous cherchions à éliminer depuis 2008 sont toujours bien présents.

En fait, les risques systémiques se sont encore accrus dans l’intervalle. Dans de nombreux pays, les plus gros acteurs ont encore grossi, qu’il s’agisse de banques ou de gestionnaires d’actifs. La surveillance du secteur financier a conduit à une monoculture de grande ampleur : uniformisation et durcissement des règles permettent un contrôle plus facile, mais limitent la diversité.

Les boucles de rétroaction dans le système fonctionnent désormais de manière accélérée, cela a été rendu bien visible par la « twitter-panique bancaire » sur la Silicon Valley Bank. La panique s’est autorenforcée par le biais des médias sociaux jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'échappatoire.

On ne lutte pas contre la complexité en laissant le système se perpétuer tel quel et en se contentant de le réglementer. Comparez le secteur financier avec la nature, comme cela a déjà été fait en 2008, et vous comprendrez facilement pourquoi. Il faut éviter qu’une seule espèce dominante ne survive, et de rendre le système toujours plus vulnérable à force de monoculture, de perte de diversité et de contraintes extrêmes.

Il faut donc veiller à plus de diversité. Cela signifie lutter contre la dominance de quelques espèces, menant à l’effondrement de tout le système lorsqu’une espèce ou une pièce du système tombe. Il faut éviter que les éléments problématiques ne prennent en otage tout le système.

Nous ne l’avons pas fait. À cause du lobbying, par amnésie ou par manque de courage. L’être humain est incorrigible. Alors qu’en pensez-vous : les choses se passeront-elles autrement cette fois-ci ?