Une série de maisons anciennes, des jardins fleuris, l'odeur du printemps, le chant des oiseaux, et les cris des enfants dans la cour de l'école voisine. Nous sommes dans la rue Gaston Bary, à La Hulpe dans le Brabant wallon, où se situe l'habitat groupé co-créé parChristophe et ses 11 partenaires. Dans une grande bâtisse, un groupe de 12 adultes et 6 enfants, qui ont entre 1 à 82 ans, vit dans ce lieu étonnant.

habitat groupé Gaston Bary.
Une partie des Partenaires de l'habitat groupé Gaston Bary. Photo: Carole Detroz

De la villa unifamiliale à l’habitat groupé


Le bâtiment principal, qui date d’environ 1890, a d'abord été la résidence d'un vétérinaire, qui y a également construit des écuries latérales. L’ensemble a ensuite été cédé en 1925 à l’Archevêché de Malines qui y a créé une maison de repos pour prêtre âgés. En 1970, cette activité s’arrête et le lieu est tranféré à la Congrégation des Sœurs du Saint Cœur de Marie pour y accueillir leur nouveau couvent.

Dans les années 1990, les Sœurs y réalisent d’importantes transformations : construction d’une chapelle indépendante ouverte aux habitants du quartier, installation d’un ascenseur et ajout de deux étages à l’arrière du bâtiment. L’ensemble comprend une belle bâtisse de 1300 m2, répartis sur 3 étages et flanquée d'une chapelle, ainsi qu’un bâtiment latéral (les anciennes écuries) de 450m² sur 2 étages.


Des vendeurs qui ont des valeurs 


Depuis quelques années, les sœurs sont moins nombreuses et les espaces deviennent trop grands. Elles décident alors de construire et d’occuper une maison plus petite sur le terrain adjacent et de chercher preneur pour acheter l’ancienne bâtisse. 

De leur côté, Christophe et ses Partenaires – c'est ainsi qu'ils ont décidé de se qualifier – cherchent à établir un projet d'habitat groupé intergénérationnel. L'offre des Sœurs est idéale, tant sur le plan spatial que temporel. En effet, les lieux ont été depuis longtemps conçus comme espaces collectifs accueillant des personnes âgées : au rez-de chaussée, pas de marches à gravir, le jardin est de plain-pied et tous les étages sont accessibles via l'ascenseur.

Une partie des Partenaires de l'habitat groupé Gaston Bary dans la grande salle commune. Photo: Carole Detroz

Au rez, une grande salle commune s'ouvre sur le jardin et le bâtiment comprend de nombreux locaux pouvant être transformés en espaces communs (buanderie, chambre d’ami, grenier partagé). Cerise sur le gâteau, les sœurs ne sont pas pressées de vendre au plus offrant. Elles préfèrent un projet qui a du sens. Or le temps, c’est souvent ce qu’il faut au développement d’alternatives telles que l’habitat groupé. Sans des vendeurs prêts à s’engager dans la durée, les démarches d'achat groupé sont difficiles à mettre en place dans un temps court, à la différence d’achats plus classiques, par des ménages seuls ou des promoteurs. 


Un habitat groupé intergénérationnel et inclusif


Pour Christophe, la quarantaine, marié, père de deux enfants de 7 et 13 ans, développer un projet d'habitat groupé, c'est d'abord se donner les moyens de renforcer des rapports de voisinages, qu'il a toujours eu et toujours apprécié, tout en gardant son chez soi. Quant à vivre entouré de plusieurs générations, c'est pour lui une façon de lutter contre la solitude et l'isolement qu'il a pu observer chez les personnes âgées qui vivent seules. Pour plusieurs des partenaires plus âgés du groupe, c'est bien sûr aussi une alternative à la perspective d’une maison de repos où les personnes âgées vivent plus séparément du reste de la société. 

Le jardin et le potager communs. Photo: Carole Detroz

Au niveau humain, les liens entre les différents occupants ont été renforcés lors des nombreux week-end de travaux communs de démontages intérieurs préalablement à la rénovation lourde réalisée par l’entrepreneur, ce qui a permis également quelques économies financières.

Les emménagements dans les 8 appartements ainsi crées se sont étalés progressivement depuis l’été 2021 et les partenaires profitent au jour le jour des nombreux avantages de l’habitat groupé : repas communs conviviaux, échange de services, partage d’équipements, etc.

Mais le projet va encore plus loin. L’asbl Hocus Pocus La Hulpe, que Christophe et son épouse ont cofondés avec d’autres parents et des professionnels actifs dans le domaine du handicap de grande dépendance, s’attèle à la construction d’une piscine dans l'ancienne chapelle. Et pas n'importe quelle piscine : ici se trouve l'un des rares bassins destinés aux personnes à mobilité très réduite, comme son fils de 13 ans. Pour elles, se baigner est une grande source de bien-être physique et psychologique. Mais les piscines classiques ne sont pas adaptées : température trop basse, vestiaires mal équipés. Ici, on trouve un hall assez grand pour le rangement des chaises roulantes, deux vestiaires entièrement équipés de systèmes d’aide aux transferts. Et bien sûr un bassin qui prend place dans un espace ouvert et lumineux. Les anciens vitraux ont été conservés pour rappeler la première fonction des lieux et un certain sens de la conservation du patrimoine. Très peu d'équipement de ce type existent dans notre pays. Si bien que les lieux sont déjà presque totalement réservés par des groupes de bénéficiaires qui feront vivre cette partie du site, d'ici la fin de l’été.


Des choix écologiques


L'habitat groupé qui a été créé ici est aussi intéressant sur le plan écologique et ceci, pas tant dans la recherche de technologies avancées d'économie d'énergie mais par des choix fondamentaux qui pèsent lourds dans le bilan carbone : rénover plutôt que construire, habiter dans un même bâtiment plutôt que dans des maisons individuelles, privilégier la mobilité douce à la voiture. En effet, loger 8 ménages dans un seul bâtiment permet de réduire les surfaces de déperdition par logement et de lutter contre l'étalement urbain et l'accaparement des terres. Cela permet aussi de mutualiser les équipements, comme les machines à laver ou les outils. La rénovation s'est faite autant que possible grâce des matériaux récupérés dans le bâtiment existant (portes, éviers, radiateurs, luminaires) et des isolants naturels (blocs de chanvre et laine de bois). Enfin, le bâtiment a l’avantage de se situer à quelques centaines de mètres de la gare de la Hulpe. Et le centre de Bruxelles peut même se rejoindre en une heure à vélo, en passant par la forêt de Soignes et le bois de la Cambre. 
 

La récolte des radis. Photo: Carole Detroz

Le site comprend trois citernes d’eaude pluie pour une capacité de plus de 20.000 litres et des gîtes pour oiseaux et chauve-souris ont été aménagés dans le haut des façades et une partie de la toiture.

Entre les premières envies et l'emménagement sur place, Christophe, son épouse et leurs partenaires auront pris plusieurs années à mettre sur pied leur projet, suite notamment à de nombreuses complications administratives. Lorsque les choses sont devenues très concrètes, ils sont retournés vers les banques pour obtenir leur crédit. Mais, comme toute alternative, elle peut effrayer, sembler complexe et risquée. Et c’est ce qu’il s’est passé : aucune banque n’a voulu accorder les crédits hypothécaires sollicités. À l’exception de Triodos sans qui tout ce projet n’aurait pas vu le jour. Et ça, c’est Christophe qui le dit ! 

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