De l’enclume à la pale

1898 : dans le village de Lem, au Danemark, la forge de Hand Smith Hansen ne désemplit pas. Les clients du forgeron sont satisfaits de son travail et les commandes affluent. Il ne tarde pas à développer son affaire, qu’il baptise VEstysk STaalteknik A/S. Cette entreprise familiale qui s’est spécialisée dans les chassis en acier tourne à plein rendement. En 1945, le nom de l’entreprise est raccourci en Vestas, plus facile à mémoriser. À cette époque, Vestas fabrique également des appareils électroménagers tels que des mixers et des balances. Elle détient aussi un brevet sur certaines machines agricoles, dont un refroidisseur de lait. Le saut que franchit alors l’entreprise afin de fabriquer des refroidisseurs pour turbocompresseurs est plus créatif qu’impressionnant.

Le fils du fondateur, Telg Peder Hansen, rachète les parts de ses associés en 1959. L’année suivante, un incendie ravage les bureaux et l’entrepôt de Vestas. Malgré cette catastrophe, les résultats financiers sont meilleurs que durant l’exercice précédent. L’entreprise bâtit une nouvelle usine, qui emploie une centaine de personnes. En 1968, Vestas fabrique des grues hydrauliques et exporte sa production à hauteur de 96%.

Durant cette période, en quête d’alternatives à l’énergie traditionnelle, Vestas mène des recherches et développe en toute discrétion une technologie de fabrication d’éoliennes. Un pas en avant qui se révélera visionnaire. La contribution de l’ingénieur Birger Madsen au développement de la technologie permettant de convertir le vent en électricité va se révéler cruciale. Lorsque la crise pétrolière éclate dans les années 1970, l’avance de Vestas dans le domaine de la recherche d’énergies alternatives lui apporte la notoriété. Ses chercheurs expérimentent alors un modèle d’éolienne baptisé ‘le fouet’ : il s’agit d’un pieu autour duquel un grand anneau en acier tourne horizontalement sur son axe – une construction finalement assez proche de celle d’un fouet de cuisine. Malheureusement, ce modèle ne se révèle pas aussi efficient que prévu.

Vestas est une belle entreprise. Ses éoliennes contribuent à une production durable d’énergie et elle se soucie également de la manière dont ses produits sont fabriqués. Vestas se montre, par ailleurs, ouverte au dialogue avec les investisseurs, ce que nous apprécions beaucoup.
Arthur van Mansvelt, Sustainability Analyst chez Triodos Research

Dans l’intervalle, deux spécialistes de l’acier que sont Karl Erik Jorgensen et Hennik Stiesdaal, finalisent dans un autre village danois la conception d’une éolienne munie de trois pales, telle qu’on en connaît aujourd’hui. Cependant, ils ne disposent pas des moyens nécessaires pour en assurer seuls la production et frappent donc à la porte de Vestas, qui teste leur invention et les embauche immédiatement. En 1979, l’entreprise érige la première des éoliennes qui feront son succès.

Turbines et turbulences

En 1980, toutefois, une terrible tempête fait perdre à l’éolienne une de ses pales. La production est interrompue, le temps pour Vestas de trouver une solution à ce problème. Ce temps mort durera finalement une année, au terme de laquelle les commandes commencent à affluer, en particulier depuis les États-Unis. En un court laps de temps, Vestas porte son effectif de 200 à 870 personnes. Mais lorsque la seconde moitié d’une commande de 1.200 éoliennes est livrée aux États-Unis au-delà de l’échéance, suite à la faillite de la société de transport initialement prévue, le client refuse la livraison. Au même moment, la législation fiscale danoise change, si bien que Vestas se retrouve soudain avec un stock d’éoliennes prêtes à fonctionner sur les bras. Menacée de ne pas atteindre son centième anniversaire, l’entreprise parviendra néanmoins à surmonter ce nouveau revers.
À partir de 1987, Vestas se concentre exclusivement sur l’énergie éolienne, y voyant une alternative de qualité pour répondre aux besoins collectifs en énergie. Elle revend ses autres activités et se rebaptise Vestas Wind Systems A/S.

Tout s’accélère alors : en 1995, elle construit le premier parc éolien offshore ; en 1998, elle entre en Bourse et suite à sa fusion avec NEG Micon, elle devient le n°1 incontesté de l’énergie éolienne, avec une part de marché de 32%. Les éoliennes de Vestas alimentent en énergie des millions de familles et à chaque instant, une de ses éoliennes est en construction quelque part dans le monde. En 2010, Vestas adopte le slogan ‘Wind. It means the world to us.’ Il s’ensuit une nouvelle période délicate, marquée par un scandale financier autour de la personne de son CEO. Aujourd’hui, Vestas regarde à nouveau l’avenir de manière positive, sous la houlette d’un nouveau manager.

Sous la loupe de Triodos Research

De par son activité, Vestas fait partie des entreprises à risque en ce qui concerne les terres rares, les minéraux de conflit, ainsi que la violation des droits de l’homme.

Parmi les terres rares transformées par Vestas, on trouve, par exemple, le néodyme, principalement extrait en Chine et en Mongolie. Les dommages causés à l’environnement et l’impact social de l’extraction du néodyme sont énormes. La Banque Triodos a engagé le dialogue avec Vestas sur cette question et celle-ci a affirmé en retour travailler à une diversification de l’approvisionnement en matières premières avec plusieurs de ses fournisseurs. Parallèlement, l’entreprise planche activement sur la manière d’utiliser des matériaux recyclés. De manière générale, Vestas est bien consciente de cette problématique et se dit prête à réduire son impact au travers de processus d’extraction responsables.

Triodos Research impose aux entreprises qui transforment les minéraux de conflit un double engagement. Tout d’abord, l’entreprise doit avoir une politique générale en matière de protection des droits de l’homme, démontrant qu’elle est bien consciente de la question des Droits de l’Homme en lien avec ses activités. Ensuite, l’entreprise doit faire tout ce qui est en son pouvoir afin d’éviter l’extraction de minéraux en République Démocratique du Congo et dans les pays voisins, ou s’assurer que les minéraux extraits dans cette région proviennent de zones ‘sans conflit’. Dans les discussions à ce sujet, Vestas s’est dit prête à chercher comment supprimer les minéraux de conflit de sa chaîne d’approvisionnement.

Il ressort de notre dialogue avec Vestas que l’entreprise fournit des efforts suffisants pour rechercher, avec ses fournisseurs, des alternatives à l’extraction de matières premières provenant de sources controversées. Nous maintenons le dialogue avec elle et l’encourageons à aller de l’avant en ce qui concerne la durabilité de sa chaîne d’approvisionnement.
Arthur van Mansvelt, analyste en durabilité chez Triodos Research

Énergies renouvelables

Nous partageons la vision européenne de la transition énergétique et (co)finançons des projets de génération d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable ainsi que des projets d'efficacité énergétique.

Ensemble vers la transition énergétique

Photo: ‘Vestas V112’ et ‘Vestas V122 close-up’ : flickr – germanborrillo